Jenny Cartwright: nouvelle collaboratrice pour la saison 4

Cette année, l’équipe de toutEs ou pantoute a la chance de pouvoir compter parmi ses collaboratrices l’excellente documentariste et créatrice sonore Jenny Cartwright. Elle est conseillère à la réalisation et la scénarisation pour notre saison 4. Depuis la fin de l’été dernier, elle agit comme mentore dans notre travail de création, nous accompagnant dans toutes les étapes de production.

Pour le premier article de la saison, nous avons eu envie de vous présenter son travail. Jenny a même accepté de se prêter au jeu du Questionnaire de Proust !

** Le questionnaire de Proust est un jeu anglais qui s’appelait autrefois Confession. Il a été popularisé par le célèbre auteur Marcel Proust par les réponses qu’il lui a apportées vers la fin du XIXè siècle.

Qui est Jenny Cartwright ?

Punk, féministe, militante, Jenny Cartwright est une artiste sonore basée à Tiohtià:ke dont le travail mérite d’être (re)connu. Elle produit, écrit, réalise et distribue ses propres productions dans un esprit DIY total depuis 2001. Par le biais de ses nombreuses œuvres, elle explore les thèmes de l’autodétermination et des inégalités auxquelles elle revient tout le temps à travers des sujets comme la gentrification, le militantisme, le travail, les luttes féministes et la pauvreté. Aujourd’hui, en plus de nous appuyer dans la réalisation et la scénarisation de la prochaine saison de toutEs ou pantoute et de travailler sur ses propres projets, elle co-programme la plage ÉCOUTE sur Tënk, une très belle plateforme qui propose une sélection de films sonores à écouter. 

On trippe sur le travail, la rigueur et la posture militante de Jenny depuis longtemps, et les valeurs communes que nous partageons font de sa collaboration un atout de taille ET un grand bonheur.

jenny cartwright
Source : Ada x

Les balados de Jenny Cartwright

Les balados de Jenny Cartwright nous immergent dans ses sujets politiques et féministes tantôt historiques, tantôt actuels – qui rendent compte de la transversalité de la résistance autant que de son intemporalité. On y apprécie particulièrement leur conception sonore remarquable, leur scénarisation et la recherche approfondie sur laquelle ils s’appuient. Jenny s’est appropriée le médium du balado pour offrir aux auditeurices des œuvres artistiques documentaires portant des messages de reconnaissance et une intention de visibilisation des luttes. On retrouve également dans ses productions des fictions sonores qui brisent les frontières du balado.

Voici quelques recommandations pour vous plonger dans son travail :

Je sais les femmes d’octobre

(2020)

Une dizaine de minutes de texte narré, puissant, écrit par Jenny Carthwright, qui est lu sur un montage sonore enveloppant nous guidant à travers son récit des luttes féministes du Québec, de 1970 à aujourd’hui. Le projet a été réalisé dans le cadre du projet Je suis une femme d’octobre du Théâtre ESPACE GO, rendant hommage à la crise d’octobre 1970.

Bienvenue aux dames

(2019)

Un court documentaire audio qui met en lumière, grâce à des archives, des entrevues et des reconstitutions, le combat courageux des féministes pour la fin de la ségrégation sexuelle dans les tavernes du Québec en 1971. 

Hortense

(2019)

Une fiction sonore inspirée de la nouvelle La Roseraie d’Esther Rochon qui relate la rêverie navale d’une femme à l’imaginaire débordant. Son habillage sonore dense accompagne à merveille la narration dont le lyrisme plaira aux plus littéraires d’entre vous.

Les plus longs documentaires audio Debouttes! (2019) et Quels morceaux de nous la tempête a-t-elle emportés avec elle? (2021) sont également des incontournables, récompensés tous deux par le prix NUMIX, rendant compte de la maîtrise incontestée du genre par Jenny Cartwright. 


Jenny Cartwright

Le questionnaire de Proust

Quel est pour vous le comble de la misère?

Renier ses principes pour de l’argent.

Où aimeriez-vous vivre?

J’adore Montréal et le quartier où j’habite. Mais j’aimerais que les berges des lacs du Québec soient accessibles, plutôt que d’être la possession de quelques-un.es, pour y passer davantage de temps l’été.

Et dans un monde où le coût des appartements n’y serait pas aussi délirant, j’aimerais beaucoup vivre à New York.

Pour quelles fautes avez-vous le plus d’indulgence?

La transgression de règles inutiles.

Quel est votre personnage historique favori ?

Angela Davis.

Vos héroïnes dans la vie réelle?

Les activistes.

Vos héroïnes dans la fiction ?

Marie I et Marie II dans Daisies, les personnages féminins de Wong Kar-Wai et ceux de Madeleine Thien dans Do Not Say We Have Nothing, Marjane Satrapi dans Persepolis, Simin dans Une separation, Pénélope dans The Penelopiad, June dans The Handmaid’s Tale, Blanche Beunon dans Frog Music, Julia Power dans The Pull of the Stars, Rose dans The Lonely Hearts Hotel.

Votre artiste favorite ?

Cette question ne peut pas être au singulier, il y a une centaine de films dans mon top 10 ! Margaret Atwood, Shirin Neshat, Jenny Holzer, la photographe Isabelle Hayeur, Nelly-Ève Rajotte, Marjolaine Beauchamp, Laura Poitras (les documentaristes sont-elles des artistes ?), Kim Gordon, les membres de Women With Kitchen Appliances, Chloé Surprenant, Marguerite Duras.

Votre qualité préférée chez une personne ?

L’empathie.

Votre défaut préféré chez une personne ?

L’impolitesse.

Votre vertu préférée ?

L’intégrité.

Qui auriez-vous aimé être ?

Une activiste.

Votre rêve de bonheur?

Un  lac. Une société moins inégalitaire. Que les ours polaires survivent, qu’on se sorte du capitalisme fossile. Que les gens réalisent qu’il n’est pas possible de vivre avec la COVID-19, et qu’ils arrêtent de faire semblant que la pandémie est terminée et laissant de côté un large pan de la société.

Parfois, j’ai envie d’une maison à la campagne et d’une communauté qui viserait l’autosuffisance. Puis je me rappelle que je suis une indécrottable citadine qui aime les festivals de films et les restos indiens.

Quel serait votre plus grand malheur?

Qu’on se retape la fin des années 20 (c’est en train d’arriver).

Ce que vous voudriez être ?

Ce que je suis : une documentariste. Et aussi parfois un chat.

Ce que vous détestez par-dessus tout ?

Le capitalisme et les oppressions sur lesquelles il repose – extractivisme, sexisme, racisme – la cupidité, la médiocratie, l’obscurantisme, l’indifférence quasi généralisée devant la crise climatique, le déni et le validisme avec lequel on réagit à la COVID en ignorant les personnes immunosupprimées à qui l’ont dit de passer le reste de leur vie en isolement alors que le système de santé s’écroule, l’extrême égoïsme exacerbé par la pandémie – pour vrai, les gens peuvent même pas porter un masque 5 minutes pour aller à la pharmacie ?! des gens malades et des personnes âgées n’ont pas le choix d’aller y chercher leurs médicaments – les gens qui ne comprennent pas la notion de privilège, ceux qui me disent depuis 10 ans que j’exagère quand je parle de la montée de la droite et de l’extrême-droite, les bien-pensants, les médias tièdes qui ne font qu’empirer le problème, le fait qu’on puisse être payé par La Presse pour écrire que Duhaime n’est pas d’extrême-droite puisque ce mot ne figure pas au programme du parti conservateur. Me niaisez-vous ?

Le don de la nature que vous voudriez avoir ?

La musique.

Comment aimeriez-vous mourir ?

Paisiblement.

Votre devise?

If you are not outraged, you’re not paying attention.

Article écrit par Ève-Laurence Hébert et Alexe Allard-Dussault | Coordonnatrices